mardi 17 août 2010

Nouméa Express



  Pourquoi "Nouméa Express"? Pour deux raisons en fait. La première, c'est que je me suis donné douze jours pour visiter la Nouvelle-Calédonie, coincés entre mes dix jours de méditation et trois petites semaines en Australie... ce qui fait assez court quand on voit l'étendue de l'île, sans parler des îles Loyauté qui l'accompagnent, toutes paradisiaques mais toutes différentes. Moi qui n'avais même pas le budget pour louer une voiture, ça paraissait difficile de tout voir en si peu de temps... Ce qui m'amène à la deuxième raison: le stop! Et comme m'a dit le fils d'un Caldoche (voir la définition dans le glossaire en pièce jointe) qui m'a vu débarqué à l'arrache pour la nuit:
"En fait c'est un peu comme Pékin express ton voyage, mais à Nouméa, C'est ça?" Ben oué, ça a donné à peu prés ça la Nouvelle-Calédonie pour moi.

  Tout a commencé à l'aéroport de Jakarta quand je me suis enfin décidé à me renseigner sur le prix des hébergements à prévoir sur le caillou, une quinzaine d'heures avant d'y être. Et là, demie surprise, ça a l'air exorbitant comparé à ce que j'avais connu jusque là. Je me dis alors que ça pourrait être une bonne idée de sortir la carte "CouchSurfing" que je n'avais pas encore vraiment exploitée.
Pour ceux qui connaissent pas encore le principe formidable du CouchSurfing, à la page du Glossaire correspondante, y'a marqué:
  "Site internet mettant en contact, d'un côté, des voyageurs de tous horizons en quête de rencontres locales et d'un logement à petit budget (en l'occurrence gratuit) avec, de l'autre, de gentils CouchSurfeurs habitants aux quatre coins du monde, tout aussi fervents de rencontres enrichissantes et se proposant d'héberger gracieusement les voyageurs sus-mentionnés à condition que le feeling passe bien."
  J'envoie donc deux mails de premier contact à des CouchSurfeurs de Nouméa (heu, le voyageur fauché dans l'histoire, c'est moi bien sûr!) pour recevoir une réponse positive de Fred et Charlotte qui acceptaient de m'héberger dès mon arrivée. Chouette! Je savais où passer ma première nuit. En arrivant à Nouméa je m'aperçois que mon sac n'avait pas couru aussi vite que moi pendant la petite heure d'escale que nous avions eu à Sydney pour sauter dans le deuxième avion. Un mal pour un bien en fin de compte, puisque je n'aurais pas à me le trimballer lors de ma première journée de visite. Hé oui les CouchSurfeurs en semaine ils bossent en général donc pas d'endroit pour déposer mémère! Après les formalités d'usage, je me fais ramener gratos de l'aéroport par une calédonienne qui avait connu les même déboires de sac unijambiste. En fait c'est le fils de celle-ci qui était venu me chercher.. heu la chercher, et qui m'a fait au passage une visite guidée de Nouméa, baies après baies, avant de me déposer au centre ville en me laissant sa carte en cas de pépin... plutôt cool comme première impression!

  Après un aprem balade, et ramassage de cartes à l'office du tourisme (hé non mon p'tit Yo, je suis pas encore sevré), je trouve enfin la maison de mes hôtes d'une nuit. Et quels hôtes! Le sourire pour commencer, puis le dîner autour d'un petit Bordeaux que je m'étais fait un plaisir de leur ramener (ça aussi, ça commençait à me manquer), des conseils en pagaille, pour finir par des coups de fils à des amis d'amis qui m'accueilleront à coup sûr dans différents coins de l'île... j'avais frappé à la bonne porte! Vraiment extra le couple Fred et Cha!

  Le lendemain je repars donc avec des idées plein la tête et mon carnet d'adresses rempli de numéros de téléphone, direction l'aéroport afin de récupérer mon sac. Une fois la grosse Bertha retrouvée, je me poste sur le bord de la route, le pousse tendu et le smile bien en évidence pour tenter d'économiser le prix du bus (aux horaires limités apparemment) et de vérifier si cette pratique qui est maintenant considérée comme quasi-suicidaire en France est toujours en vigueur en NC comme on me l'a prédit. Effectivement je n'ai pas attendu plus de 5 minutes avant que trois chauffeurs et chauffeuse successifs ("conductrice", James, "conductrice"...) ne m'emmènent gentiment à ma première halte sur la côte ouest. Je devais alors contacter une certaine Sophie Brun, travaillant au lycée de Bourail, et apparemment extra-cool, des dires de Fred et Charlotte. Je cite: « Sophie, elle faisait du CouchSurfing avant que le site existe, c'est clair! »
Je l'appelle donc pour la prévenir de mon arrivée, et elle de m'inviter à trouver sa maison, à faire comme chez moi, à me servir dans le frigo, et à emprunter son vélo en attendant son retour du travail... Accueillante, oui, c'est le mot!
  Je trouve donc l'ancienne ferme super aménagée qu'elle habite en pleine campagne et fais assez rapidement la connaissance de Thibaut, un de ses collègues temporaire du lycée qu'elle héberge gentiment pour 3 semaines. Puis je découvre finalement l'inimitable Sophie Brun à l'histoire touchante et pleine d'authenticité, dont le petit voyageur que je suis en train de devenir ne pu s'empêcher de tirer quelques leçons de vie. J'ai également rencontré la plupart de leurs collègues, le soir même, puisqu'un pot de départ était prévu de longues dates et que j'y était tout naturellement convié... elle est pas belle la vie?
  Un petit truc que je trouve toujours marrant dans les pays tropicaux, c'est de voir des vaches brouter dans un champs rempli de cocotiers... je sais c'est con mais pour mon cerveau de citadin, ça va pas ensemble. Et puis tu fais pas un pas à moins de cinquante mètres d'un troupeau sans qu'elles se mettent à te fixer fermement du regard... "Oups, vous dérangez-pas pour moi les filles, je fais que passer, vous savez..." Mais comme dit Sophie, "Ici, y'a pas de train, alors faut bien qu'elles trouvent un truc à mater!" C'est pas faux, c'est pas faux!



  J'ai ainsi profité de son hospitalité sans borne pendant trois jours avant de me ressortir les pouces pour rejoindre un autre ami de Fred et Charlotte: j'ai nommé Jacki Quentin. Un autre personnage atypique, très gentil, qui m'a ouvert sa porte pour une soirée à discuter autour d'une bière et de copieux morceaux de cerf qu'il venait de chasser avec son fils de quinze ans. Et oui, parce que les Caldoches, comme Jacki, ils ont l'habitude d'aller chasser et pêcher dès qu'ils ont un moment, comme les Kanaks d'ailleurs. Alors que les Zoreilles comme Charlotte et les Expats comme Fred, eux ils sont plutôt branchés nautisme ou plongée, vous suivez? Oui je sais, au début on rame un peu, parce que la Nouvelle Calédonie c'est un sacré mélange de populations finalement.

  Alors pour vous la faire courte, au début y'avait... les dinosaures! Oui... mais juste après en Nouvelle-Calédonie, y'avait les Kanaks ou Mélanésiens, les noirs, en clair, enfin en plus explicite plutôt, qui représentent 45% de la population actuelle. Puis sont arrivés les Caldoches, principalement d'origine française, descendants d'anciens bagnards ou de colons libres. Les Caldoches représentent 35% de la population. Ils sont parfois métisses, comme Jacki, puisqu'au fil des générations, les mariages Caldoche-Kanaks n'étaient pas rares. Les blancs installés sur l'île depuis un certain temps mais non-Caldoche sont appelés Zoreilles (comme dans les antilles ou à la Réunion, bisous doudou Dijoux) et les plus récents sont des expats, tout simplement, sans oublier les vagabonds qui viennent profiter de la gentillesse de tout ce beau monde, à savoir moi! Tant que j'y suis, ce tableau des différents Calédoniens ne serait pas complet si je ne parlais pas des Indonésiens, Vietnamiens, Chinois, Wallisiens, Arabes et j'en oublie qui sont venus ici chercher du travail depuis le début du siècle dernier. Comme d'hab, pour ceux que ça intéresse:

  J'en ai fini avec cette minute culturelle et comme disent les Guignols (au fait, ils existent encore?): "Vous pouvez maintenant éteindre votre ordinateur et reprendre une activité normale!"

Heu, en fait non... j'ai pas fini!

  Donc les dinosaures, les Kanak, les... Ha oui, donc après avoir passé une soirée à me faire expliquer tout ça par Jacki, le Caldoche et ami de Fred et Charlotte, bon prenez des notes, là, je vais pas tout répéter tout le temps; j'ai retrouvé Marie-Louise, une Kanak mariée au chef de la tribu de Haut-Coulna, située dans le nord-est de l'île pour passer le week-end en pleine nature et surtout assister à une coutume de mariage. "Et allez, encore une minute culturelle... ça devient chiant ton blog Auré!"
  Marie-Louise est en fait une amie de Sophie et je tombais plutôt bien puisque ce week-end là Marie-Louise avait déjà prévu d'emmener un couple d'amis Rochellois très sympas dans sa tribu pour leur faire découvrir cette fameuse coutume. Je me suis donc discrètement greffé au groupe.
  Ce qu'il faut savoir lorsqu'on est reçu dans une tribu en Nouvelle-Calédonie c'est qu'on se doit, pour respecter les traditions de "faire la coutume", c'est à dire de glisser un petit cadeau (du café ou du tabac par exemple) et une petit billet dans un morceau de tissu de coutume et de l'offrir au chef de la tribu en expliquant, en quelques mots, la raison de notre venue. Cette tradition a pour but d'être bien accepté par tous les habitants de la tribu lors de notre passage.
  La coutume de mariage, elle, correspond à la cérémonie qui a lieu lors du premier jour d'un mariage Kanak. Lors de celle-ci, les hommes rattachés à la famille du marié se divise en trois groupes pour rassembler une quantité incroyable de nourriture (sucre, riz, manioc, ignames, fruits, viande...), de tissus et de cadeaux plus précieux, entre autres choses pour l'offrir à la famille de la mariée. Ils forment trois groupes dont chacun porte un nom, que j'ai oublié, et tout ce qu'ils ont ainsi rassemblé est offert au clan de la mariée pour ouvrir et officialiser de façon irréversible le lien nouveau entre leur deux clans. Les femmes, quant à elles, préparent le repas de leur côté et le mariage dure pendant trois jours, avec les cérémonies plus classiques à la mairie et à l'église le deuxième jour, suivies d'une grosse fête ou les centaines d'invités (jusqu'à 600 parfois) dansent et chantent jusqu'au petit matin, non sans s'encourager de quelques gorgées d'hydromel local!!



  Nous n'avons participé qu'à la première journée, celle de la coutume, mais c'est de toute évidence la plus enrichissante d'un point d'un point de vue culturel. Le reste du week-end fut partagé entre balades champêtres dans les environs de la tribu et rencontres avec la famille de Marie-Louise et ses voisins. Encore un moment passionnant où j'ai été reçu comme un roi par ces gens que je ne connaissais pas trois jours auparavant!

Et devinez où j'ai dormi le soir suivant? Chez mon cousin Erwann et sa charmante femme Virginie, qui habitent dans une superbe baraque sur les hauteurs de Nouméa après 8h et 400km de stop. En fait je n'avais pas les coordonnées d'Erwann avant d'arriver sur l'île et n'ai pu les prévenir que le matin même! Un peu gonflé le mec, non? Je n'avais vu Erwann que deux fois dans ma vie, du coup ce passage éclair m'a permis de les découvrir et d'en apprendre un peu plus sur la vie d'expatrié d'Erwann. Virginie, elle, est née ici et n'est plus qu'à quelques mois de donner naissance à leur premier enfant. Inutile de vous dire que j'ai encore une fois été accueilli à bras ouverts, et qu'ils se sont mis en quatre pour arranger mes galères de routards:
"Heu, Erwann, j'ai plus une thune pour payer le taxi et remonter de l'aéroport, tu pourrais venir me chercher, s'il te plaît?"
Une vraie plaie, j'vous jure!



  Il me restait alors cinq jours pour profiter de ma halte rapide de ce côté du globe et j'ai donc décidé de les passer sur une petite île à quelques km à peine de la grande terre: l'île des Pins.

Petit caillou aux plages de rêves mais avec un temps plutôt mitigé où j'ai sorti ma tente une place pour ne pas payer les hébergements un peu trop onéreux pour mon budget. J'ai donc débarqué le premier soir à la nuit tombée dans un camping désert (les gérants ne dormant pas sur place et étant le seul campeur), après m'y être gracieusement fait déposé par le chauffeur du très prestigieux Méridien, tout proche. N'ayant pas encore acheté de bouteille de gaz, j'ai jeté la boîte de raviolis dans les restes d'un feu aux braises encore rouges, authentique, pour me régaler en essayant de deviner les contours de la piscine naturelle qui fait la réputation du lieu: terrible. Les bruits de cochons sauvages et de chiens fouillant les poubelles n'étaient pas des plus rassurant mais qu'importe, la nuit fut plutôt bonne et la découverte du lieu au petit jour, un vrai régal!



  Après une autre nuit passée sur place, la pluie et l'ennui m'ont poussé à me faire déposer, toujours en stop, de l'autre côté de l'île où j'ai fait la connaissance de Benjamin, un dentiste vraiment cool, exilé sur la Grande-terre pour encore quelques semaines et qui m'a tout naturellement proposé de partager sa case pour m'éviter de monter ma tente entre deux averses. Il m'a permis de faire la connaissance d'un autre routard, très bon esprit, Christophe, qui a commencé son trip par une traversée de l'atlantique, respect, puis quelques mois en Afrique et continue en suivant à peu près le même itinéraire que moi mais en sens inverse! On s'est d'ailleurs fait invités à prendre l'apéro par de jeunes retraités en balade sur leur magnifique voilier de 45 pieds; et j'avoue que l'idée de me jeter à l'eau commence à germer, hé, hé ;)

L'histoire ne serait pas complète si je ne parlais pas de cette petite Mamie adorable que j'ai aidé à planter quelques plantes pendant qu'elle me racontait l'histoire des premiers voyageurs Soccodo qu'elle prenait plaisir à héberger au temps où il n'y avait pas encore de camping sur l'île. Elle voulait biensûr parler des routards et de leurs "Sacs à dos", mais j'ai mis quelques bonnes minutes à percuter, véridique! Et puis ce généreux passager de mon vol de retour de l'île des Pins qui voyant que je ne trouvais pas de consigne pour déposer mon sac l'après-midi en attendant de retrouver Virginie et Erwann pour ma dernière soirée à Nouméa, me l'a tout bonnement gardé dans sa bagnole et est venu me le ramener en fin d'aprem... après échange de numéros, noms et plaque d'immatriculation, je vous rassure.



La dernière soirée fut une énième occasion de faire de belles rencontres, à savoir les amis de Virginie et Erwann qui avaient prévu une soirée et m'ont invité à me joindre à eux, bonne humeur garantie et avérée.

Bon, je crois que c'est plutôt clair! L'expérience en Nouvelle-Calédonie m'a permis de voir à quel point beaucoup de gens peuvent être généreux, souriants et avides d'échange. Biensûr j'en connaissais certains et le bouche à oreille aide à mettre les gens en confiance. Biensûr la chance a joué en ma faveur, encore une fois et j'ai pris mon mal en patience quand je voyais que les choses ne se déroulaient pas tout à fait comme je le voulais, surtout avec les aléas du stop. Je sais aussi qu'il faut rester méfiant et qu'ici comme ailleurs, les gens peuvent être mal-intentionnés, méchants ou avoir l'alcool mauvais, et qu'on peut se trouver au mauvais endroit au mauvais moment. Mais ce que j'ai vu sur cette île, ce sont des gens venus d'ici et aussi beaucoup d'ailleurs qui essayent encore aujourd'hui d'apprendre à vivre ensemble et à se respecter et qui se battent bien souvent pour continuer à se saluer, à part peut-être à Nouméa (les villes ne sont pas faites pour ça), à ne pas trop faire de généralités et qui n'ont pas oublié qu'aider son prochain est une condition essentielle à la vie en communauté.

Alors, je n'ai qu'un mot à dire: Merci!
Merci à tous ceux qui m'ont tendu la main, et souvent bien plus que ça, lors de mon escapade en Nouvelle-Calédonie et qui m'ont permis de visiter cet archipel magnifique sans dépasser mon budget de 15 euros par jours (si, si!) et m'ont surtout aidé à découvrir et comprendre ses multiples facettes!

Merci, merci, merci, du fond du cœur!

1 commentaire:

  1. noumea express: 850 lignes
    et si ça avait pas été express???
    ;)

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